Avant-première dans le cadre du 9ème Festival du Cinéma Québécois en hommage au réalisateur québécois Denis Villeneuve ; « Arrival » (Premier contact)
Lorsque de mystérieux vaisseaux venus du fond de l’espace surgissent un peu partout sur Terre, une équipe d’experts est rassemblée sous la direction de la linguiste Louise Banks afin de tenter de comprendre leurs intentions.
Face à l’énigme que constituent leur présence et leurs messages mystérieux, les réactions dans le monde sont extrêmes et l’humanité se retrouve bientôt au bord d’une guerre absolue. Louise Banks et son équipe n’ont que très peu de temps pour trouver des réponses. Pour les obtenir, la jeune femme va prendre un risque qui pourrait non seulement lui coûter la vie, mais détruire le genre humain…
Un an après « Sicario » et « Enemy », deux créations hypnotiques sorties à quelques mois d’intervalle, le cinéaste canadien Denis Villeneuve est de retour avec « Premier Contact », un film de SF que les critiques et le public se font une joie d’encenser. Verdict après les 120 minutes de métrage ? Encore une fois, le réalisateur nous scotche à notre fauteuil.
Ne tournons pas autour du pot, « Premier contact » est un grand film de SF. De ceux qui captivent de la première à la dernière scène. Et la raison est claire comme de l’eau de roche : Denis Villeneuve déroule une partition parfaite. Ni plus, ni moins. Des acteurs impeccables aux cadrages hypnotiques en passant par la mise en scène d’une tension palpable à chaque instant, « Premier Contact » nous fait vivre une expérience mystique unique. De mémoire, seul « La rencontre du troisième type » de Steven Spielberg était parvenu à nous hypnotiser autant. Et encore, il est loin derrière le film du cinéaste acclamé après le chef-d’oeuvre « Incendies » en 2010.
Concept rongé jusqu’à la moelle, l’arrivée d’entités extraterrestres a toujours donné beaucoup d’idées aux écrivains et aux cinéastes. Parmi les œuvres les plus marquantes du 7e Art, on peut citer le délirant « Mars Attack » de Tim Burton, le blockbuster « Independance Day » de Roland Emmerich ou encore l’inquiétant « Signes » de M. Night Shyamalan. De très bons films que « Premier Contact » surpasse. Tous, sans exception.
Dès les premières minutes, Denis Villeneuve donne le ton. Une douzaine de vaisseaux viennent de se poser à douze endroits différents du globe. Amis ou ennemis ? Des experts en langue (dont Louise Banks, formidablement incarnée par Amy Adams) tentent d’instaurer le dialogue avec eux. En découle une succession de rencontres où, disons-le clairement, il ne se passe pas grand-chose mais où le réalisme est tel qu’on y croit dur comme fer.
A l’image du premier échange avec les « Heptapodes », on est estomaqué, incapable de bouger un cil. Cet état de stress et d’ensorcellement ne nous quittera plus jusqu’à l’arrivée du générique de fin. Un générique que l’on en vient presque à regretter. Et dire que c’est Denis Villeneuve qui est aux commandes de « Blade Runner 2 » avec Harrison Ford et Ryan Gosling…
De Premier contact, film de science-fiction signé Denis Villeneuve, on avait déjà vu et commenté la bande-annonce, très prometteuse. A Venise, où le film était présenté jeudi 1er septembre, les promesses ont été tenues, le film réalisant un sans faute pendant ses 2/3 tiers, captivants, d'une densité inédite, fondée sur l'approche et la découverte vertigineuse d'une forme de civilisation, autre qu'humaine. Rappelons le pitch. En douze lieux du globe, des extra-terrestres ont débarqué sur la terre, mais sans quitter leurs vaisseaux noirs, oblongs, suspendus juste au-dessus du sol. Qu'attendent-ils ? Pour comprendre leurs motivations, les comprendre tout court en fait, l'Armée américaine dépêche une linguiste universitaire (Amy Adams) en charge de les approcher et de décrypter les curieux symboles circulaires, avec des sortes de traîne, qu'ils projettent sur un mur-écran, à l'intérieur de leur vaisseau caverneux. Un scientifique (Jeremy Renner) l'aide dans sa tâche.
Adaptée d'une nouvelle, L'Histoire de ta vie, de Ted Chiang, cette aventure immobile – on voyage loin en restant la plupart du temps confiné – mène à des conflits d'ordre stratégique et militaire, à l'échelle de la planète, les Chinois et les Russes faisant front commun contre ce qu'ils estiment être une déclaration de guerre. Sans trop divulguer, on dira juste que l'enjeu du débarquement des créatures venues d'ailleurs tourne autour de leur relation au temps, différente de la nôtre, et qui rejaillit directement sur l'émérite polyglotte. C'est à la fois passionnant et un peu frustrant, la fin ayant mérité selon nous plus de développement.
Mais tant sur le rapport à la langue (qui façonne les rêves, notre pensée, etc.) que sur la physionomie plastique des créatures (on a pensé aux araignées géantes de Louise Bourgeois), le film, ambitieux mais sans prétention, se démarque clairement du tout venant. Annoncé comme un mixte de Kubrick (2001, l'Odyssée de l'espace) et de Spielberg (Rencontres du troisième type), le film rappelle aussi le cinéma de M. Night Shyamalan, dans son talent pour installer la tension, se fondre dans un décor et attendre. On aime y voir aussi un manifeste contre le repli sur soi, une apologie de l'inconnu, fût-il synonyme de grand danger. Dernier point : Amy Adams y casse la baraque, par sa concentration très sexy. Comme on va la revoir très vite dans Nocturnal Animals de Tom Ford, lui aussi, en compétition, parions que cette 73e édition sera pour elle synonyme de consécration.
RENCONTRE DU TROISIÈME TYPE
Résumé : Le monde a été envahi par des extraterrestres. Le gouvernement américain embauche
alors un linguiste afin qu’il déchiffre leur langage et découvre leurs intentions.
C’est probablement
l’un des cinéastes les plus brillants du moment. Du genre que l’on se régale à suivre tant sa filmographie regorge de trésors placés sous un éclectisme fascinant. Denis Villeneuve est toujours là où
on ne l’attend pas, et ses longs-métrages s’enchaînent avec une certaine conception kubrickienne du cinéma, où comment s’atteler sans cesse à des projets tous très différents les uns des autres. Ses
premières œuvres (Un 32 Août sur Terre ou Maelström) ne ressemblent en rien à Incendies, son premier grand chef-d’œuvre. De même, Incendies ne ressemblait en rien à ses premières incursions
hollywoodiennes (Enemy et Prisoners), pas plus que Sicario n’avait à voir avec ces dernières. Denis Villeneuve aime à
changer de registre en permanence et l’on a hâte de voir ce que le canadien va faire de la patate chaude Blade Runner 2049, projet casse-gueule par excellence. En attendant, il se
frotte d’ores et déjà à la science-fiction avec Premier
Contact, alias Arrival en version originale.
Oui, Denis
Villeneuve est l’un des plus grands génies du cinéma actuel et il prouve une fois de plus l’immense étendue de son talent avec Premier Contact, faux blockbuster de science-fiction qui réussit l’exploit de
sacrifier le spectacle à l’intelligence, sans pour autant basculer dans le film d’auteur intensément ennuyeux. Prodigieux. Porté par une distribution impeccable (formidables Amy Adams et Jeremy
Renner), Premier Contactreprend à son compte un sujet pourtant
ultra-éculé au cinéma, en l’occurrence l’arrivée d’aliens débarquant sans crier gare dans le ciel de notre planète bleue. Comment réagirions-nous ? Comment communiquerions-nous avec ces lointains
visiteurs ? Quelles seraient les premières mesures prises ? Quelles seraient les premières problématiques qui découleraient de ce « premier contact » avec une autre civilisation ?
De Contact à Independence Day, de 2001, L’Odyssée de l’espace à E.T.en passant par Stargate, Rencontre du Troisième Type, La Guerre des Mondes ou le récent documenteur The Visit – Une Rencontre extraterrestre, la SF s’est toujours régalée à
imaginer ce qu’il se passerait en cas de rencontre extraterrestre, avec des approches très différentes, fantaisistes et ultra-spectaculaires ou plus sérieuses, dramatiques voire
scientifiques. On pensait aujourd’hui, qu’il allait être difficile de se réinventer sur un sujet aussi saigné par le passé. A tort. Denis Villeneuve y parvient, et brillamment, livrant au
passage un nouveau chef-d’œuvre du genre, à ranger aux côtés des plus grandes œuvres.
Dans sa première
moitié, Premier Contact est passionnant par ce qu’il
raconte et par la manière dont il pose son univers avec un sérieux scientifique dès plus admirable. Dans la seconde, il se hisse vers le génie par la façon dont il bouleverse certaines conceptions
insaisissables voire métaphysiques, notamment notre façon humaine d’appréhender le temps et l’espace. Premier Contact nous pousse à oublier totalement notre manière
d’appréhender le temps, passé, présent et futur, et tente de nous impliquer au maximum dans une expérience au-delà de tout. Du jamais vu au cinéma.
Modèle de
narration, modèle de mise en scène, perpétuellement créatif et intelligent sur la forme comme sur le fond, Premier Contact a beau partager quelques ressemblances issues de
l’imaginaire collectif (on ne peut s’empêcher de songer vaguement autant à 2001 qu’à La Guerre des Mondes version Spielberg), il n’empêche que son mérite,
outre ses qualités visuelles et la beauté de sa réalisation et de son montage, s’inscrit surtout dans le sentiment de nouveauté qu’il affirme à chaque instant. Avec Premier Contact, Denis Villeneuve réussit l’impensable. Il ne réussit pas
seulement à rafraîchir un récit pourtant archi-rebattu, il réussit à bouleverser certains codes et principes de narrations. Il réussit même à incarner certaines idées pourtant quasi
« in-incarnables ». Plus fort, il réussit à mettre en images des conceptions qui bouleversent complètement notre rapport au monde. Comme quand il redéfinit et bouleverse ce rapport au
temps, cette manière d’appréhender sa linéarité. Certains y verront des incohérences. Erreur. Premier Contact exigence simplement d’oublier ce que l’on connaît en
tant qu’être humain, pour percevoir les choses autrement, selon une autre approche, un autre angle. Sidérant, il bascule alors du côté de ces œuvres que l’on a besoin de revoir plusieurs fois pour en
saisir l’infinie richesse cachée derrière une intrigue pourtant simple. La marque de fabrique de Denis Villeneuve. Partir du simple pour développer du complexe. Partir du spectaculaire pour
développer de la réflexion.
Avec son humanisme émouvant et sa profondeur sondant la nature humaine, Premier Contact tort le cou à des années de SF moderne visant essentiellement l’entertainement distrayant, pour privilégier l’intime et l’abandon total à des questionnements plus dominants. Comme souvent, Denis Villeneuve navigue entre les lignes de plusieurs genres. Ici, le canadien explore la science-fiction, mais glisse derrière elle, vers le drame, vers le mélodrame, vers le thriller géopolitique… Partant d’une situation exceptionnelle, le metteur en scène déploie un film fort, nourri autant par un extraordinaire saisissant, que par un ordinaire poignant. Mais ce qui frappe le plus, c’est l’agencement de toutes ces intentions, dans un long-métrage aux prises multiples. Car si Premier Contact peut se voir classiquement, du début vers la fin, sa construction gagne en complexité au fil des minutes, alors qu’il se réinvente et se reformule progressivement. Et au final, on se rend compte, déboussolé, qu’il peut également s’appréhender dans l’autre sens, de la fin vers le début, pour une toute nouvelle lecture aussi fascinante que la première. En prêtant attention, on comprend que Villeneuve glisse des indices ça et là, tout au long de son film, indices qui ne sont ni plus ni moins, que le reflet de l’essence même de son film et des clés pour sa compréhension. A l’instar de l’évocation du concept grammatical du palindrome (un mot se lisant à l’identique dans les deux sens) au détour d’un simple prénom. Aucune importance à priori, juste un dialogue sans intérêt, mais non. Cette évocation est avant tout un indice lancé aux spectateurs attentifs. Car Premier Contact est un palindrome cinématographique, chose que l’on ne comprendra que plus tard, probablement comme mille autres choses imperceptibles dans cette œuvre de génie, dont la prodigieuse substance richissime se digère lentement, mais passionnément. Et tout ça sans jamais être prétentieux, sans jamais être assommant. Chapeau.